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Accueil Journal de bord NORMAN'S, WARDERICK WELLS & STANIEL CAY (EXUMAS) 23-31/03 - Les copains d'abord

Les copains d'abord
Arrivés au mouillage à l'Ouest de Norman's Cay en pensant y trouver une bonne protection du vent de Sud Est, nous nous demandons si nous allons nous attarder ici, devant cette minuscule piste d'atterrissage qui servait autrefois aux dealers de drogue qui avaient installé leur fief ici, perdu au milieu des Exumas. Le mouillage est un peu agité, l'endroit sans grand intérêt a priori.

 

Et puis tout à coup, nous apercevons sur la plage non pas une, ni deux, ni même trois mais bien quatre petites têtes blondes!! Un coup d'oeil avec nos jumelles de pacotille nous permet à peine de distinguer le drapeau du bateau qui héberge cette joyeuse marmaille alors nous allons voir directement sur la plage ce qu'il en est. A notre grande joie, les 4 frimousses parlent français "là", avec un joyeux accent québécois qui leur donne encore plus de charme.

 

 Voici Gabrielle, 6 ans, Myriam 5 ans, Véronique 3,5 ans et Eve bientôt 2 ans. Autant de personnalités différentes pour faire la joie de Coline et Eden! Nous passons notre première après-midi avec eux sur la plage et faisons la connaissance de Catherine la maman, que je regarde comme une sainte ou la Lara Croft des mères de famille. J'ai déjà parfois du mal à en gérer 2, alors 4, elle est de celles qui méritent une médaille!!!

 

Arrivent ensuite Yannick le papa et Jim, leur grand copain bateau américain avec qui ils font route.  Le bateau de la famille de Montreal porte un nom en hommage à  cette émouvante chanteuse: Lahsa. Avec un bon gout pareil, sûr que nous allons faire un bout de chemin avec eux! Ils ont tout vendu à Montreal, lâché leur job et font route vers le Brésil pour 5 ans a priori. Mais comme tout projet bateau, ça peut encore changer. Disons qu'ils font comme nous… en plus ambitieux! Respect… Jim, adorable quinquagénaire plein de précieuses connaissances, a vendu sa boite depuis de longues années, largué tous ses amarres américains, y compris sa voiture qui pour lui était "comme une ancre au pied", adepte de Rifkin et de la troisième révolution industrielle, il plairait beaucoup à mon père et il navigue seul sur l'imposant Carisma (un ketch de 56 pieds doté de tout le confort qu'un "terrestre" pourrait attendre sur un bateau) sur les traces de Lahsa.  

 

C'est donc maintenant à trois que nous continuons notre périple. Un nouveau volet du monde des bateaux s'ouvre à nous avec cette première rencontre de gens ouverts et généreux, dans une ambiance joyeuse de bambins plutôt rare à trouver dans les Bahamas.  Je découvre l'usage de la VHF: "Lahsa, Lahsa pour Suricat ?". Comme les filles devant leurs talkie-walkie, je suis une vraie gamine avec cet engin et je me plais à écouter les discussions des autres bateaux dans toutes les langues.

Ca me passera surement très vite, mais pour le moment, je ne m'en lasse pas !

 

 Nous changeons tous de mouillage le lendemain et découvrons l'intérieur de Norman's Cay qui cachait bien des merveilles. La plage "des riches" comme nous la surnommons car les jet ski débarqués des méga-yatchs viennent y faire des ballades à la hauteur de leurs attentes (et des nôtres)!. Une plage immense entre océan et bank, du sable si fin et si pur qu'on s'y enfonce comme dans des sables mouvants, une eau d'une clarté à faire pâlir n'importe quel lagon des Tuamotu… un des plus beaux endroits que nous ayons vu jusqu'ici et en plus, miracle, l'eau y est chaude grâce a sa faible profondeur et son marnage assez important !! Nous passons toute la journée, les fesses dans l'eau, à apprécier nos premiers moments de socialisation, un régal !

 

Description d'une journée type de rêve sur SURICAT :

 

- Levé à l'heure où les yeux ont décidé de s'ouvrir (je passe quand même sur les réveils nocturnes encore pour vérifier que le courant, inversé par rapport au vent, n'a pas fait déraper le bateau. Nous ne voulons pas nous essayer au mouillage Bahaméens et ses deux ancres, alors nous devons veiller à ne pas nous faire avoir)

- Petit déjeuner dehors à admirer le paysage et les bateaux alentours

- Ecole avec Coline pendant 1H30 pour ne pas oublier les rudiments de lecture, écriture et avancer un peu en maths puisque ça a l'air de rentrer. Nous ne sommes pas très assidues sur l'école, pas encore, et pour ces jours-ci, on privilégiera les moments avec les copines tant qu'il y en a.

- Préparation de madeleines devenues ma spécialité !

- Départ avec les copains pour la plage où l'énergique et ingénieuse Catherine organise une chasse au trésor. Quel régal pour les enfants de chercher de cocotiers en rochers les indices qui les emmènent jusqu'au précieux butin de pièces d'or ($ CAN) enfoui dans le sable rose… Si ce n'est pas une enfance heureuse, qu'est ce donc ?

- Déjeuner puis sieste en profitant de l'immense avantage pour une fois d'avoir le courant inversé par rapport au vent. Le bateau se met face au courant pendant que le vent souffle de l'autre côté et qu'une brise traverse délicieusement le carré… Si ce n'est pas le luxe, qu'est ce donc ?

- Retrouvailles l'après midi sur une autre plage jusqu'au coucher du soleil pour discuter mécanique pour les hommes (notre problème d'alimentation du guideau, a l'air d'éveiller la curiosité) cuisine et sens de la vie pour les femmes, et dieu sait quel sujet pour les filles qui nous foutent à tous une paix royale… Si ce n'est pas l'équilibre…

- Dîner sous la pleine lune sur Suricat entouré des petites lumières des feux de mouillage des bateaux voisins qui dansent dans la nuit, si ce n'est pas poésie…

- Finir même par un long Skype avec les parents en attrapant contre toute attente un réseau ouvert sur cette île perdue, pour leur dire que si tout ça n'est pas le bonheur, qu'est ce donc???

 

Sur la route pour Wardwick Wells nous évitons de peu l'échouement… Nos cartes informatiques, l'une sur le charteplotter Raymarine, l'autre Navionics sur l'iphone et l'Ipad, nous indiquent toutes deux des fonds tout à fait convenables, environ 4,5 mètres sur toute la route avant l'arrivée au grand mouillage de Wardewick situé à l'Ouest de Emerald Rock. Pourtant, à l'instant où je sors d'une courte sieste, l'eau commence à devenir étrangement claire. Très belle certes, mais ce changement de couleur de l'eau est fort suspect. Et la descente vertigineuse d'un coup du sondeur l'est encore plus!! Les cartes ne montrent aucun banc de sable, mais force est de constater que nous sommes dans de l'eau cristalline, et ce à perte de vue, et que le profondimètre affiche 2.2m, 2m, 1.8m, 1.6m… Halte là !!

Nous sommes à la voile, heureusement pas très véloce une fois de plus, mais branlebas de combat, nous roulons le génois et "faisons demi-tour immédiatement" comme l'aurait préconisé n'importe quel bon GPS terrestre.

LAHSA qui faisait route derrière nous (partis deux heures plus tard que nous mais arrivés à notre niveau…) nous indique que cette bande de sable se voit parfaitement sur l'Explorer Chart, l'incontournable bouquin papier bible des Bahamas. Nous l'avons pourtant, mais n'avons pas songé à le regarder de plus près avant de partir. Ne jamais se fier totalement aux cartes électroniques donc, toujours confirmer toutes ses sources et au final… rien ne vaut le visuel ! Mais il s'en est fallu de peu que nous nous ensablions juste avant l'arrivée. Rien de bien grave pour le bateau mais je pense que cela nous aurait fait bizarre…

 

Wardewick est situé au plein centre de l'Exhuma Park, réserve naturelle où il est interdit de pêcher, ramasser, déposer, "langousteriser" quoi que ce soit. L'idée est belle mais oh combien frustrante car nous y voyons nos premières langoustes en snorkeling. 5 et pas moins dans un petit trou sur la première patate de corail rencontrée… Elles existent donc bien ces fameuses langoustes, sans doute justement parce que leur pêche est interdite, mais quel supplice ! On en salive dans le tuba…

 

Première grande ballade après tous ces jours de mer car Wardewick offre des sentiers variés, entre mangrove, collines, plages désertes. L'émulation fait marcher la petite troupe des 6 moussaillons plus vite que les parents! Nous déposons comme tout un chacun une petite planche de bois tout en haut de Boo Boo Hill où je grave péniblement le nom de Suricat.

Drôle de cimetière où s'amoncellent sur toute sorte de support les noms de tous les voyageurs des mers, on y reconnait ceux entendus plus tôt sur la VHF et qu'on a déjà l'impression de connaître un peu…

 

Nous lançons un concours de pêche à Carisma et Lahsa sur la route pour Staniel Cay à quelques 20 miles de là. Nous aurions mieux fait de faire un concours de ramassage de kilos d'algues car c'est bien la seule chose que notre dizaine de leurres à nous trois auront réussi à attraper ce jour là… Ce n'est décidément pas notre heure et on continuera à se contenter de saucisses/bacon pour les jours à venir. En faisant preuve d'un peu d'imagination, on arrive presque à avoir l'impression de manger varié ! 

 

Super mouillage idéalement calme et protégé à l'Ouest de Big Major Cay, nous mouillons tous les trois là au milieu de dizaines de bateau, on se croirait dans la marina de St Tropez, cela choque un peu après toutes ces journées isolés.

La différence, c'est qu'à St Tropez, il n'y a pas de cochons qui nagent (ou en tous cas pas de vrais, seulement des cochons anthropomorphiques). Nous l'avions promis aux filles, et nous tenons promesse ! 

 

Nous ne nous attendions pas à nous retrouver face à de tels bestiaux. Ce ne sont pas des petits cochons de ferme tout roses et gentillets qui nous accueillent sur la plage… Nous nous retrouvons face à un énorme cochon sauvage, habitué à venir chercher à se restaurer sur les bateaux mêmes, à peine descendus du dinghy avec Yannick, ses 4 filles et nos deux moussaillons, nous nous faisons presque charger par la bestiole.

Je tiens les plus petites dans les bras en me demandant tout de même si ce n'est pas un peu carnivore ce truc là (ce qu'Eric me confirmera plus tard) et si un petit pied de moussaillon ne ferait pas son affaire, pendant que les plus grandes se ruent dans le dinghy espérant être à l'abri.

Mais le bout de lard sur pattes couine et grogne et lorsqu'il se met à escalader le dinghy, les hurlements des 6 filles doivent se faire entendre jusqu'à Nassau… Les hommes prennent des photos, je tente de gérer un peu la panique et les filles qui m'escaladent, n'étant moi-même pas super rassurée.

 

Au final Yannick attire le bestiaux au loin avec quelques morceaux de pain et les filles courent se réfugier dans les rochers coupants vu que leur propre dinghy ne leur offre pas l'abri escompté. Cauchemars garantis pour le soir... Mais au final elles sont toutes ravies de l'expédition, les enfants sont décidément plein de contradictions, tout ce qui compte, c'est que ça bouge !

 

A l'instar des nos amis quadrupèdes qui font leurs besoins dans l'eau cristalline, nous avons surnommé depuis quelques temps notre beau bateau "la fosse sceptique" ou encore "Suricat's fragrance" pour faire plus classe. Les photos ne montre pas l'odeur mais lorsque l'on approche à l'arrière (sous le vent donc) de Suricat en dinghy, on se demande tout de suite s'il n'y pas une station d'épuration dans le coin.

 

C'est d'ailleurs ce que pensait notre voisin Dan de North Bimini, et le jour où il s'est ouvertement posé la question d'une station d'épuration dans le coin, nous nous sommes dit qu'il fallait décidément faire quelque chose…  Nous ne pouvons laisser notre bateau empester de la sorte! Il semble y avoir une malédiction de fosse sceptique qui pèse sur plusieurs générations dans la famille et je ne rentrerai pas ici dans les détails des histoires sordides de toilettes qui ont touché aussi bien le côté Pinel que le côté Mortier, mais disons que nous commençons à être des habitués du fait. 

 

Eric finit par trouver une solution à force de lavage des tank à l'eau de mer, un peu de galets de chlore que nous avons sous la main et une soigneuse procédure d'ouverture et fermeture des "waste tank" en temps voulu, cela semble fonctionner. 

Plus d'odeurs suspectes et nauséabondes à l'approche de notre magnifique maison flottante, ça finissait par faire tâche !

 

Temps d'élever un peu le débat et de nous envoler pour des sphères plus glamour. Staniel Cay abrite le rocher de Thunderball, la grotte où fut tourné l'aventure de James Bond du même nom. Apparemment il est difficile en voyant le film de reconnaître l'endroit, mais une chose est sûre, Hollywood ou pas, l'endroit est absolument magique. On rentre dans la grotte pendant l'étale par un étroit passage et le snorkeling y est fantastique. La géographie du lieu méritait bien un tournage et le petit film de notre réalisateur préféré en dira bien plus long. Enjoy! Les filles n'en finissent pas de jouer toutes ensemble et on sent dans leur comportement que ce renouement avec de petits gnomes de leur age leur fait le plus grand bien. A nous adultes aussi ! Nous finissons notre périple à Staniel Cay par une chasse aux cookies de Pâques sur la plage.

Pas celle aux cochons, nous sommes courageux mais pas téméraires. On aura même réussi à conserver la magie des cloches (pas des lapins, interdit de les citer!!). Disons que les cochons de Pâques ont bien réussi leur coup pour la joie de nos petites têtes blondes, adeptes et expertes maintenant des chasses au trésor, qu'on se le dise au fond des ports !

 

Thunderball Grotto - Grotte sous-marine de Staniel Cay
 
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